Evening Standards
Aujourd'hui c'est l'anniversaire de la petite. La seule personne que j'aime dans ce monde. Les autres, fuck them all.
Elle a dix ans aujourd'hui. Dix ans. C'est fou. Je l'appelle vers huit heures et nous parlons un petit moment. Elle est pas très réveillée encore. Il nous tarde de nous revoir.
Poiur le reste, c'est un jeudi comme tant d'autres. C'est la fin du mois d'avril et le ciel grisaille. Je vais travailler. Je me fais chier. Je dîne, un sandwich. C'est pas bon, comme d'habitude. Je finis le boulot à une heure de l'après-midi.
Quatre heures après je suis à Madrid. Le soleil. Cette luminosité. Cette chaleur qui pénètre tous les pores. Cette ville qui est censée être aussi un peu la mienne, mais que je connais si peu. Il fait bon d'être ici. L'air est différent, on respire mieux. On se sent déjà plus libre. Le ciel semble ne pas avoir de limites.
F. vient me chercher avec son taxi. Il a bien changé. Ses cheveux sont devenus presque blancs. Il a beaucoup vieilli en si peu de temps. Mais il a l'air en pleine forme. Il n'est plus cette loque qu'on avait dû amener à l'hôpital psychiatrique il y a un an ou deux. Il a encore l'air un peu à l'ouest, mais au fond, qui ne l'est pas...
Et nous passons à l'appart poser les affaires. Cela faisait onze ans que je n'y étais pas allé. Rien n'a changé. Le temps s'est arrêté, tout est intact. J'ai l'impression de pénétrer dans un sanctuaire, dans une tombe scellée, dans un monument au passé, à notre passé. Aux jours où tout était si délicieusement simple.
Sur les étagères il y a encore les livres que je lisais quand j'étais gamin. Nous fêtons nos retrouvailles. Nous avons tous bien vieilli depuis.
Et nous sortons dans la rue, et nos rencontrons M, sa fiancée. F. s'est marié deux fois, a eu trois gosses, et il a encore le courage de se trouver une copine. Y en a qui changeront jamais...
Et nous sommes dans la rue, et je découvre ce qui m'entoure avec des yeux d'enfant. Je souris quand je constate qu'ici les feux font des bruits d'oiseau quand ils sont au vert. On est bien loin du brzzzz que font les feux là où j'habite. Je souris de voir qu'il fait beau, que le soleil se couche tâchant le ciel de rouge et de feu et que les filles sont belles avec le nombril à l'air.
Nous nous asseyons sur une terrasse et nous laissons la soirée s'écouler paisiblement.